Bien-être

Déconstruire le mythe et cultiver les données probantes

22 août 2018 Spectrum Therapeutics

Il y a 20 ans, lorsque Vincent Maida a commencé à prescrire du cannabis à des fins médicales à Toronto, il a été le pionnier d’une option de traitement alors controversée dans la communauté médicale. Ce qui a d’abord piqué son intérêt, c’étaient les histoires de ses patients atteints de cancer, de sclérose en plaques et douleur chronique qui continuaient de souffrir malgré les médicaments standards.    

Leur qualité de vie en était améliorée et ils pouvaient continuer la chimiothérapie et la radiothérapie. Leur qualité de vie en était améliorée et ils pouvaient continuer la chimiothérapie et la radiothérapie. On me considérait comme hérétique, fou, un charlatan, mais en voyant les résultats chez mes patients, j’ai continué. »    

Au cours des dernières années, monsieur Maida a constaté une plus grande ouverture d’esprit et plus d’acceptation de la part de ses pairs. Il a notamment prononcé le discours liminaire lors de la réunion scientifique annuelle de l’association canadienne des oncologues médicaux (ACOM) qui s’est tenue le 26 avril à Toronto. « Je trouve remarquable qu’un médecin en soins palliatifs soit nommé pour adresser le discours liminaire de la réunion annuelle d’un organisme national d’oncologie », a-t-il dit. « On voit bien que le vent est en train de tourner en faveur de l’acceptation. »    

Vincent Maida a vécu toute sa vie à Toronto. Il a obtenu son baccalauréat ès sciences et son doctorat en médecine à l’Université de Toronto, ainsi qu’une maîtrise ès sciences en traitement des plaies.Il travaille depuis 35 ans à l’hôpital général d’Etobicoke, où il est spécialiste en médecine palliative et participe à la recherche clinique sur la douleur, la gestion des symptômes et le traitement des plaies.    

Au début de sa carrière en médecine palliative, le DMaida a assisté à des conférences internationales, au cours desquelles il a entendu des personnes influentes parler des thérapies à base de cannabis, dont Robert Twycross (Université d’Oxford), un pionnier du mouvement des soins palliatifs.   

 
« Ces conférences m’ont convaincu du domaine de spécialisation, avant la légalisation du cannabis à des fins médicales », a-t-il affirmé. « Lorsque les cannabinoïdes pharmaceutiques sont apparus (p. ex., le dronabinol et le nabilone), j’ai commencé à en prescrire. »    

Il a ensuite publié une étude d’observation prospective sur le nabilone (Maida et al 2008), dans laquelle on signalait pour la première fois les cannabinoïdes comme agent d’épargne des opioïdes, un sujet de première importance ces jours-ci. Son étude suggérait que la consommation de cannabinoïdes pharmaceutiques était associée non seulement à une meilleure gestion de la douleur et des symptômes, mais aussi à une réduction de l’utilisation d’opioïdes et d’autres médicaments.    



Un manque d’essai clinique ne signifie pas un manque de données probantes    

« Je suis surpris d’entendre plusieurs médecins dire qu’il manque de données pour appuyer l’utilisation du cannabis à des fins médicales comme option de traitement », a dit Vincent Maida. « Les écoles de médecine forment leurs étudiants à croire en une seule chose :  aux études randomisées et contrôlées (ECR).  Or, ce n’est pas parce qu’on manque de données provenant de ce genre d’étude que nos données sont inefficaces. Les meilleures données pour la médecine factuelle sont celles qui passent l’épreuve du temps. Les cannabinoïdes existent depuis des milliers d’années et on les utilisait dans les cultures anciennes pour guérir toutes sortes de maladies. Ces substances fonctionnement. »    

Vincent Maida croit que nous commençons tout juste, après près d’un siècle de prohibition, à rassembler le type de données probantes qui pourra convaincre ceux qui insistent à se baser sur des données standards et contemporaines. « Entre-temps, ces professionnels de la santé ne rendent pas service à leurs patients : en fait, en prenant cette position, ils leur causent du tort et commettent ainsi une injustice. »    



La valeur des données empiriques    

Les sceptiques critiquent souvent l’utilisation de données empiriques pour soutenir les bienfaits du cannabis à des fins médicales. Le Dr Maida, au contraire, perçoit de la valeur dans toutes les sources de données probantes, pas seulement dans les essais contrôlés et randomisés.    

« Les rapports de patients constituent encore la source de données la plus fiable », a-t-il affirmé. « Tout commence par une anecdote. Nous pouvons rassembler plusieurs anecdotes pour ensuite les étudier en détail. Les médecins et les scientifiques commencent à comprendre que la médecine factuelle a ses lacunes et qu’elle ne représente pas toujours la réalité. »    

Pour donner un exemple, Vincent Maida cite ce qu’il considère être un lourd facteur limitant des études contrôlées et randomisées : la nature restreinte des sujets à l’essai. « La médecine factuelle reste imparfaite tant qu’on ne se base pas sur des cohortes.  Pour traduire parfaitement les données d’une étude contrôlée et randomisée, il ne faudrait prescrire le médicament qu’à des personnes qui correspondent aux participants de l’étude. Prenez l’exemple des hypocholestérolémiants, des médicaments réputés efficaces dans la réduction des crises cardiaques et des accidents vasculaires cérébraux. Les populations qui ont servi à l’étude de ces médicaments sont celles des personnes dans la trentaine, la quarantaine et la cinquantaine. Aucune donnée d’ECR n’appuie qu’on en prescrive aux personnes âgées de 80 ans, mais on en prescrit quand même aux personnes âgées. »    


« Le cannabis à des fins médicales : déconstruire le mythe et cultiver les données probantes »    

Lors de son discours liminaire à l’ACOM, Vincent Maida a abordé le système endocannabinoïde, le potentiel des thérapies à l’aide de cannabinoïdes dans la gestion de la douleur et des symptômes en soins de soutien oncologiques, et a présenté l’éventail des modes d’administration et des thérapies à base de cannabinoïdes.  Il s’était basé sur des études publiées, en mettant l’accent sur l’examen récent des données probantes actuelles effectué par la National Academies of Sciences, Engineering, and Medicine (NASEM) (2017). Cet examen, effectué sur plus de 10 000 articles évalués par les pairs, a conclu qu’il existe des données concluantes ou substantielles à l’appui de l’utilisation du cannabis à des fins médicales pour traiter la douleur chronique, les nausées et vomissements induits par la chimiothérapie (NVIC) et la spasticité musculaire chez les patients atteints de sclérose en plaques. 

« Ces données probantes comprennent les plus récentes méta-analyses effectuées sur 10 ECR menées à l’aide de cannabinoïdes pharmaceutiques et sur 6 ECR menées à l’aide de cannabis à des fins médicales. La méta-analyse de la NASEM confirme mon expérience empirique en lien avec la douleur et les NVIC. »    

Pour le patient atteint de cancer, les objectifs des soins peuvent varier : d’abord la guérison, ensuite la prolongation de la durée de vie et, finalement, la prestation de soins palliatifs pour adoucir la fin de vie. Vincent Maida, lui, prescrit le cannabis à des fins médicales pour chacun de ces objectifs.


« On devrait intégrer le cannabis dans la pratique dès le jour 1 du diagnostic, et non seulement pour gérer la douleur et les symptômes », a-t-il dit. « Il est bien dommage d’attendre que la personne soit en phase terminale, alors qu’il y a tellement de preuves qui appuient l’intégration de la médecine à base de cannabinoïdes dans le traitement. On soulagerait mieux sa douleur, on gérerait mieux ses symptômes, et il tolérerait mieux ses traitements oncologiques. On pourrait améliorer sa qualité de vie et peut-être prolonger sa durée de vie sans provoquer de séquelles, outre les frais du cannabis à des fins médicales. » 


La nécessité de prodiguer des conseils médicaux continus après la légalisation    


Vincent Maida croit fermement qu’on doit maintenir le volet médical, même lorsque le cannabis récréatif sera légalisé au Canada plus tard cette année.    


« Oui, absolument : le volet médical doit se distinguer du volet récréatif. Nous devons inciter les patients à consulter leur médecin au lieu de s’automédicamenter. »  Il s’inquiète que les patients expérimentent eux-mêmes (en étant peu informés) au lieu de consulter un médecin. « Ils achèteront le mauvais produit, ils réagiront mal à celui-ci et ils penseront que le produit ne leur apporte aucun avantage. »    

Vincent Maida estime aussi que les professionnels de la santé peuvent (et doivent) s’informer sur le cannabis à des fins médicales et devenir à l’aise d’en prescrire eux-mêmes, puisque ce sont eux qui connaissent le mieux leurs patients. « Si un oncologue traite un patient qui a besoin de cannabinoïdes, il devrait être à même d’en prescrire. Si un neurologue est chargé d’un patient, c’est lui qui devrait émettre une ordonnance. »  

Vincent Maida est, depuis plus de 20 ans, témoin des avantages des traitements à l’aide de cannabis à des fins médicales dans sa pratique clinique; il incite les oncologues à envisager d’utiliser des cannabinoïdes chez chacun de leurs patients, dès le début.    


Les cannabinoïdes ne devraient pas être envisagés après les traitements standards. On devrait les utiliser dès le début des traitements oncologiques. »


« Je souhaite qu’on puisse intégrer les thérapies à base de cannabinoïdes en oncologie dès le début du cheminement du patient, plutôt qu’à la toute fin, en désespoir de cause lorsque celui-ci est en phase terminale. »    



Références    

Maida V, Ennis M, Irani S, et al. 2008. Adjunctive nabilone in cancer pain and symptom management: a prospective observational study using propensity scoring. J Support Onc. 6(3):119-124.

National Academies of Sciences, Engineering, and Medicine. 2017. The health effects of cannabis and cannabinoids: Current state of evidence and recommendations for research. Washington, DC: The National Academies Press. http://nationalacademies.org/hmd/
reports/2017/health-effects-of-cannabis-and-cannabinoids.aspx. Publié en 2017. Accessed November 24, 2017Consulté le 24 novembre 2017.

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